lundi 31 octobre 2011

Il ne suffit pas de dire que certains cas présentent une défense maniaque, puisque dans tous les cas la position dépressive est atteinte tôt ou tard, et on peut toujours s'attendre à ce que l'on s'en défende. En tout cas, l'analyse de la fin d'une analyse (qui peut commencer au début du traitement) comprend l'analyse de la position dépressive.

Donald W. Winnicott, La défense maniaque

dimanche 30 octobre 2011

Reconnaissons, pour conclure, que nous sommes tous des survivants psychiques, et que notre travail d'analyste (en plus du fait qu'il nous fait vivre) nous permet, quotidiennement, de confirmer les solutions que nous avons trouvées à nos propres traumatismes passés, ceux-là mêmes qui nous ont donné le désir de devenir analystes. Avec chaque analyse, avec chaque analysant, nous continuons notre analyse et redécouvrons la psychanalyse. Ce sont ces redécouvertes constantes qui nous aident à survivre psychiquement.

Joyce McDougall, Quelles valeurs pour la psychanalyse ?

samedi 29 octobre 2011

Ce qui en principe, alors, demeure commun à tous les psychanalystes, c’est d'une part la reconnaissance et l'expérience personnelles de l’inconscient et, d'autre part, le soupçon systématique porté à toute expression, tout acte issus de lui-même ou de l'autre et la nécessité constante de les confirmer, récuser ou réinterroger à la lumière de cette double exigence. Double exigence qui fait leur spécificité, les distingue absolument de tous les autres praticiens de la psychothérapie et les ramène chacun à se retrouver "en dernière analyse" monade parmi toutes les autres, seul maître à bord, seul juge de lui-même, même si, comme tous ses confrères, il lui faut, sa vie durant, parler à d'autres, réfléchir avec d'autres de ses doutes, ses interrogations, ses trouvailles, ses convictions actuelles issues de cette pratique à nulle autre pareille. Qu'on l'appelle exigence de vérité, désir spécifique de l'analyste, ce qui le porte, ce à quoi il croit, c'est à une telle éthique, qui n’est pas celle de l'aide immédiate  de la priorité accordée à la disparition des symptômes. L'absolu de son exigence - et c’est à lui seul qu'il appartient d'en évaluer l'aune - n'a pour seule limite que l'obligation de ne pas nuire. La pratique de la cure implique une technique, mais plus ou moins imprégnée d'empirisme et d'improvisation où jouent tout autant l'expérience que l'inventivité. C’est un art en sa double acception de savoir-faire, fonction du tempérament propre de l'analyste, et d'un ensemble de connaissances et de règles d'action. Celui-ci dépend de ses options, selon l'école dont il est issu ou, plus simplement et plus directement, de son imprégnation par ses superviseurs, de la pensée des auteurs qu'il a privilégiés, jusqu'à s'être ainsi constitué, "bricolé", sa petite métapsychologie personnelle, elle-même en fonction de sa personnalité, de ses rencontres, du type de patients et des problèmes auxquels il se voit confronté.

Raymond Cahn, La fin du divan ?

vendredi 28 octobre 2011

En 1974, le philosophe et psychologue Anatole Rapaport de l'université de Toronto émet l'idée que la manière la plus "efficace" de se comporter vis à vis d'autrui est:

1) la coopération

2) la réciprocité

3) le pardon.

C'est-à-dire que lorsqu'un individu ou une structure ou un groupe rencontre un autre individu, structure ou groupe, il a tout intérêt à proposer une alliance. Ensuite il importe, selon la règle de réciprocité, de donner à l'autre en fonction de ce que l'on reçoit. Si l'autre aide, on l'aide; si l'autre agresse, il faut l'agresser en retour, de la même manière et avec la même intensité. Enfin il faut pardonner et offrir de nouveau la coopération.

En 1979 le mathématicien Robert Axelrod organisa un tournoi entre logiciels autonomes capables de se comporter comme des êtres vivants. Une seule contrainte: chaque programme devait être équipé d'une routine de communication, sous-programme lui permettant de discuter avec ses voisins.

Robert Axelrod reçut 14 disquettes de programmes envoyés par des collègues, universitaires également intéressés par ce tournoi. Chaque programme proposait des lois différentes de comportement (pour les plus simplistes, deux lignes de code de conduite, pour les plus complexes, une centaine), le but étant d'accumuler le maximum de points.

Certains programmes avaient pour règle d'exploiter au plus vite l'autre, de lui voler ses points puis de changer de partenaires. D'autres essayaient de se débrouiller seuls, gardant précieusement leurs points et fuyant tous contacts avec ceux susceptibles de les voler. Il y avait des règles du type: "si l'autre est hostile, l'avertir qu'il doit modifier son comportement puis procéder à une punition". Ou encore: "coopérer puis obtenir des défections surprises provoquées par un système aléatoire".

Chaque programme fut opposé 200 fois à chacun des autres concurrents. Celui d'Anatole Rapaport, équipé du comportement CRP, (Coopération-Réciprocité-Pardon), battit tous les autres.

Encore plus fort : le programme CRP, placé cette fois au milieu des autres en vrac, s'avéra au début perdant devant les programmes agressifs, mais finit par être victorieux puis même "contagieux" au fur et à mesure qu'on lui laissa du temps. Les programmes voisins constatant qu'il était le plus efficace pour accumuler des points, alignèrent en effet leur attitude sur la sienne.

Bernard Werber, L'Encyclopédie du savoir relatif et absolu

jeudi 27 octobre 2011

Je suis allé dans la mort intérieure et j’ai vu que la mort extérieure était meilleure que la mort intérieure. Et j’ai décidé de mourir extérieurement et de vivre intérieurement.

Carl Gustav Jung, Liber Secundus, ch. III, « Un parmi les humbles »

mercredi 26 octobre 2011

Le souvenir est une forme de rencontre.

Khalil Gibran, Le sable et l'écume

mardi 25 octobre 2011

La douleur ne peut être absente de la personnalité. Une analyse doit être douloureuse, non parce que la douleur a nécessairement une valeur, mais parce qu'une analyse où la douleur ne serait pas observée et prise en compte ne saurait s'attaquer à une des principales raisons de la présence du patient.

Wilfred R. Bion, Eléments de la psychanalyse

lundi 24 octobre 2011

Le rêve est en somme comme une régression au plus ancien passé du rêveur, comme une reviviscence de son enfance.

Sigmund Freud, L'interprétation des rêves

dimanche 23 octobre 2011

Chaque goutte d'eau a sa part dans l'immensité de l'océan.

Gandhi

samedi 22 octobre 2011

Fidèle à sa méthode de confrontation avec l’inconscient, Jung propose d’« accepter sa dépression » plutôt que de la fuir, et, dans la mesure du possible, de « lui donner la parole […] : on transforme ainsi l’humeur en objet observable au lieu de la laisser s’emparer du sujet qu’elle domine ». On s’aperçoit ainsi que certains épisodes dépressifs correspondent à des périodes d’« incubation » : ils préparent un changement d’attitude ou d’orientation du sujet, à condition que celui-ci échappe à la fascination du néant (cf. ce que l’alchimie appelle nigredo ou phase de dissolution). Par ailleurs, il existe pour Jung, une forme non pathologique de l’abaissement du niveau mental, distincte donc de la dépression et de la « perte d’âme ». Dans les moments de trop grande crispation ou d’unilatéralité excessive du conscient, l’abaissement du niveau de conscience peut rééquilibrer la relation entre le moi et l’inconscient en redonnant à chacun sa valeur relative. Par ailleurs, si « l’image développée dans l’œuvre d’art » – le « percept » de Gilles Deleuze – trouve sa source, non pas dans l’inconscient personnel de l’auteur, mais dans l’inconscient collectif, il faut s’attendre à ce que l’abaissement du niveau de conscience soit une condition favorable, sinon nécessaire, pour entrer en contact émotionnellement avec le monde mythologique des « images primitives ».

Aimé Agnel, Vocabulaire de Jung

vendredi 21 octobre 2011

Chaque individu est engagé dans une expérience, celle de vivre - dans un problème, celui d'exister.

Donald W. Winnicott, L’adolescence

jeudi 20 octobre 2011

On se demande parfois si la vie a un sens... et puis on rencontre des êtres qui donnent un sens à la vie.

Brassaï

mercredi 19 octobre 2011

L'intimité est un ensemble réciproque et simultané de transactions composées d'affects (P2 -> E2) et de communion (E2 -> E2).

Laura et Harry Boyd, L'intimité comme structuration du temps, Les Classiques de l'analyse transactionnelle n° 3

mardi 18 octobre 2011

Le fantasme de la scène originaire est une structure transindividuelle et une interprétation après-coup que le sujet élabore quant aux rapports sexuels entre les parents, dans une scène où il se représente lui-même en personne ou selon les substituts que lui imposent sa théorie sexuelle et les représentants de ses investissements pulsionnels oraux, anaux, urétraux et génitaux. Les théories sexuelles de l'enfant rationalisent ces interprétations en les censurant, en les transformant et en les inscrivant dans la pensée et dans l'image.

René Kaës, La parole et le lien

dimanche 16 octobre 2011

Le fantasme fait partie de l'effort accompli par l'individu pour affronter le monde intérieur.

Donald W. Winnicott, La défense maniaque

samedi 15 octobre 2011

Là où il y a un symptôme, il y a aussi une amnésie, un vide, une lacune dans le souvenir, et si l'on réussit à combler cette lacune, on supprime par là même le symptôme.

Sigmund Freud, Cinq leçons sur la psychanalyse

vendredi 14 octobre 2011

Il n’y a pas un grand nombre de vérités, seulement quelques-unes. Leur signification est trop profonde pour qu’on les saisisse autrement que sous forme de symboles.

Carl Gustav Jung, Le Livre rouge

jeudi 13 octobre 2011

Pathos, en grec, c'est la passion, le trouble, la douleur, la maladie, bref tout ce qu'on subit ou endure. C'est en ce sens que Kant dira pathologique tout ce qui n'est pas libre ou autonome, et spécialement tout ce qui est déterminé par la sensibilité. Le sens moderne est beaucoup plus étroit : est pathologique ce qui relève d'une maladie, et cela seul. Le contraire du normal ? Pas tout à fait, puisqu'il est normal d'avoir des maladies, et puisque l'état pathologique, comme disait Canguilehm, continue d'exprimer un rapport à la "normativité biologique", qu'il modifie sans l'abolir (Le normal et le pathologique, conclusion). Disons que le pathologique est l'exception qui confirme, le plus souvent douloureusement, la règle de la santé, qui est d'être fragile et provisoire.

André Comte-Sponville, Dictionnaire philosophique

mercredi 12 octobre 2011

Entre
ce que je pense,
ce que je veux dire,
ce que je crois dire,
ce que je dis,
ce que vous avez envie d'entendre,
ce que vous croyez entendre,
ce que vous entendez,
ce que vous avez envie de comprendre,
ce que vous comprenez.

Il y dix possibilités qu'on ait des difficultés à communiquer mais essayons quand même.

Bernard Werber, Nouvelle encyclopédie du savoir relatif et absolu

mardi 11 octobre 2011

Je suis d'avis que chaque forme de psychopathologie représente, chez l'individu, un type spécifique de limitation de sa capacité d'être pleinement vivant en tant qu'être humain. Le but de l'analyse est dès lors plus large que celui de résoudre un conflit intrapsychique inconscient, réduire la symptomatologie, renforcer la subjectivité réflexive et la connaissance de soi, accroître la faculté d'initiative personnelle. Bien que la sensation d'être vivant soit intimement mêlée à chacune des capacités sus-mentionnées, l'expérience de la vitalité possède, je crois, la qualité de leur être hyperonymique, et doit par conséquent être estimée comme un aspect de l'expérience analytique selon ses propres termes.

Thomas H. Ogden, Analyser les formes de vie et de mort dans le transfert/contre-transfert

lundi 10 octobre 2011

L'imaginaire est ce qui tend à devenir réel.

André Breton, Le Revolver à cheveux blancs

dimanche 9 octobre 2011

Les théories décident de l'avenir des critères, et non les critères de l'avenir de la théorie.

Serge Moscovici, communication à l'Association psychanalytique de France, dans le cadre du cycle de débats "Recherche scientifique et actualité de la psychanalyse", printemps 1987

samedi 8 octobre 2011

L'interprétation doit respecter le narcissisme du patient et éviter tout ce qui pourrait constituer une blessure narcissique. Kohut, par exemple, se démarque tout à fait de la technique classique de l'analyse des résistances. Dans le modèle du conflit l'un des moyens de l'analyste est de "vaincre les résistances" de façon à ouvrir une issue à l'inconscient refoulé. Kohut constate que ce modèle entraîne souvent une sorte de climat de lutte entre l'analyste et son patient et est l'occasion de blessures narcissiques pour celui-ci. D'autre part, dans la mesure où il considère la pathologie comme un arrêt du développement, la notion de "résistance" perd son sens au profit de celle de "défense" mise en place, dans un but de protection, par le self affaibli par l'arrêt de son évolution : "Toutes ces soi-disant résistances sont au service des buts profonds du self et n'ont pas à être vaincues." (Analyse et guérison)

Agnès Oppenheimer, Heinz Kohut

vendredi 7 octobre 2011

Il est assez stérile d'étiqueter les gens et de les presser dans des catégories.

Carl Gustav Jung, L'homme à la découverte de son âme

jeudi 6 octobre 2011

Pour moi, un travail de type psychanalytique a à se faire là où surgit l'inconscient : debout, assis ou allongé ; individuellement, en groupe ou dans une famille ; pendant la séance, sur le pas de la porte, au pied d'un lit d'hôpital, etc. : partout où un sujet peut manifester ses angoisses, ses fantasmes, ses failles à quelqu'un supposé les entendre et apte à lui en rendre compte.

Didier Anzieu, Psychanalyse : que reste-t-il de nos amour ?

mercredi 5 octobre 2011

J'ai montré que la position idéologique s'établit comme défense contre l'ouvert par où menace la persécution du dehors et l'ambivalence du dedans, c'est-à-dire la destruction du bon objet. D'une certaine manière est-elle une défense contre la mentalisation, contre le degré zéro du penser : contre l'éprouvé. Elle une position de fermeture sur l'objet idéalisé, dans l'allégeance duquel sont tenues toutes les manifestations psychiques de l'éprouver, du représenter, de l'agir et du relier. Triple allégeance à l'idéal (idéalogie) à l'idole (idologie) à l'idée d'omnipotence (idéologie) rectrice de la réalité psychique toutefois déniée comme telle au profit de l'objectivation dans le réel : toute idéologie est objectivation et se donne pour objectivité. Elle ne tolère pas l'écart différentiel entre le désir et l'objet, entre le dedans et le dehors, entre le Soi et l'environnement. Elle s'organise comme reflet et répétition du même au même, assurant dans la clôture du discours la clôture des échanges intersubjectifs et la clôture des formes sociales dans lesquelles ces échanges pourraient avoir lieu, s'ils ne mettaient en péril le Moi en sa division suturée. l'idéologie (la position idéologique) est une fonction d'assignation univoque. C'est aussi l'espace identique au fétiche imposant la mise en place de l'objet au sujet : le temps de l'idéologie empiète sur l'avènement de l'histoire.

René Kaës, Crise, rupture et dépassement

mardi 4 octobre 2011

La bonne question pour interpréter l'énoncé ne serait donc pas "qu'est-ce qu'il a dit ?", mais "qu'est-ce qu'il fait en disant cela ?". C'est d'ailleurs ce que Freud avait déjà bien senti et théorisé en termes de transfert.

Jacqueline Cosnier, Du côté du non-verbal, Revue de psychothérapie psychanalytique de groupe n° 17, 1991

lundi 3 octobre 2011

Qu'est-ce donc qu'une mauvaise herbe, sinon une plante dont on n'a pas encore découvert les vertus.

Ralph Waldo Emerson

dimanche 2 octobre 2011

L'individu narcissique est celui qui ne s'intéresse pas à moi.

Didier Anzieu, Mon A.B.C.daire

samedi 1 octobre 2011

Les plaintes des clients sont semblables aux serrures fermées des portes qui s’ouvrent sur une vie plus satisfaisante. Les clients ont essayé tout ce qui leur paraissait raisonnable, juste et bien, et ce qu’ils ont tenté était fondé sur leur propre perception de la réalité, mais leur porte est restée close ; ils pensent par conséquent qu’il n’y a pas de solution à leur situation. Cela les conduit souvent à des efforts de plus en plus importants pour comprendre pourquoi la serrure est comme elle est ou pourquoi elle ne s’ouvre pas. Pourtant, il paraît clair que les solutions doivent se trouver dans les clés plutôt que dans les serrures, et que les passe-partout (de différentes sortes) peuvent ouvrir un grand nombre de serrures différentes. Il suffit qu’une intervention convienne pour qu’une solution puisse émerger. Il n’est pas nécessaire qu’elle égale la complexité de la serrure. Le simple fait que le problème présenté par le client soit compliqué n’entraîne pas que la solution doive l’être également.

Steve de Shazer, Clés et solutions en thérapie brève