vendredi 28 avril 2023

[...] j'ai constaté chez un certain nombre de patients une illusion. L'illusion est la suivante : ces gens, pour des raisons que je n'ai pas à détailler, ont extrêmement peur de leurs pulsions, mais ne le savent pas. [...] L'illusion, c'est de penser qu'il suffit d'être aimé pour résoudre les problèmes. Or, ce n'est pas vrai, cela ne résout rien du tout parce que rien ne peut venir remplacer la position fondamentale qui est d'aimer soi-même.

André Green, Associations (presque) libres d'un psychanalyste. Entretiens avec Maurice Corcos

jeudi 27 avril 2023

L’ambition de Freud est, à l’origine et fondamentalement, thérapeutique : son génie théorique, sa vaste culture de juif qui a fait siennes les idées de l’Aufklärung, nous le font souvent oublier. Confronté au délire des êtres parlants que nous sommes, il découvre que c’est le désir qui en est l’onde porteuse, et que, dans cette intersubjectivité amoureuse que sera le transfert, le langage est le meilleur véhicule et le moyen optimal (le seul ?) nous permettant à chacun de reconstruire infiniment nos identités fragiles et toujours menacées.

Julia Kristeva, entretien avec Alain Braconnier, Le CarnetPsy n° 110, 2006

mercredi 26 avril 2023

Dans les années 1940, à Londres, au cours desdites « Controverses » au sein de la Société britannique, Anna Freud inventa le terme « kleinien » pour dire de Klein qu’elle n’était pas une freudienne – pas une « vraie » analyste donc. Cette même forme de rejet a été utilisée à l’égard de Winnicott et de Bion : Winnicott était « trop gentil » avec ses patients et Bion, plutôt que psychanalyste, n’était qu’un « mystique ». Moi, cependant, je perçois Winnicott, Bion, mais aussi Herbert Rosenfeld, comme les acteurs d’un changement important ; ils ont fait bouger la psychanalyse en faisant porter l’accent, non plus sur la recherche de la signification symbolique du jeu et des rêves, mais sur ce qui peut être vécu dans le fait même de pouvoir jouer et rêver. Aujourd’hui, la direction du changement dans l’expérience analytique vise moins le fait d’apprendre à se connaître ou à se comprendre que l’expérience même d’apprendre à être celui que l’on est, celui que l’on peut devenir.

Thomas H. Ogden, Pour une nouvelle sensibilité analytique ou "que veux-tu être quand tu seras grand ?", entretien avec Nicolas Gouglois et Katryn Driffield

mardi 25 avril 2023

Voilà pourquoi la sexualité infantile, qui est soumise au refoulement, est la force motrice principale de la formation du symptôme, et que l'élément esentiel de son contenu, le complexe d'Œdipe, est le complexe nucélaire de la névrose.

Sigmund Freud, "Un enfant est battu". Contributions à la connaissance de la genèse des perversions sexuelles

lundi 24 avril 2023

Le corps est le dernier recours pour signifier la souffrance psychique inconnue.

René Kaës, Les alliances inconscientes

vendredi 21 avril 2023

Je désigne ainsi [par ce concept de « parents internes »] un troisième terme situé entre ce que dit le patient et ce qu'entend l'analyste. Ce troisième terme réaparraît entre ce que l'analyste croit dire et ce que le patient entend effectivement. Ce troisième terme ne coïncide pas, ne peut pas coïncider avec les parents de la réalité matérielle. Ces parents internes ne coïncident pas davantage avec la représentation que se font les patients de leurs parents. Les parents qui m'intéressent ici sont ceux qui prennent forme dans le dire du patient, au-delà de ce que le patient croit que les parents sont. Ils diffèrent également de ceux que l'analyste se représente à partir de sa théorie ou de l'image proposée par leurs patients.

Haydée Faimberg, À l'écoute du téléscopage des générations : pertinence psychanalytique du concept

jeudi 20 avril 2023

l'é-motion n'est pas un état permanent intérieur. Comme son nom l'indique, c'est un mouvement, qui fait sortir de soi celui qui l'éprouve. Elle s'extériorise par des manifestations physiques et s'exprime par une modification du rapport au monde. L'être ému se trouve débordé, du dedans comme au-dehors.

Michel Collot, La matière-émotion

mercredi 19 avril 2023

La position paranoïde (ou persécutrice) nous fait redouter d'être envahi non seulement dans notre corps mais surtout dans notre esprit par un être tout-puissant, tyrannique, menaçant, qui nous environne, qui est plus un morceau indifférencié de corps et d'esprit qu'une véritable personne et dont aucune frontière, aucune barrière ne nous sépare et ne nous protège. L'angoisse ici, prend des formes du genre : on pénètre dans mon corps pour exciter en moi certaines sensations, on me vole mes pensées, on m'influence dans mes désirs, mes idées. D'où la méfiance à l'égard de tous ceux qui me témoignent de la curiosité, de l'intérêt, de l'affection. D'où l'alternative : ou attaquer avec violence ce persécuteur si on réussit à l'identifier, ou se retirer dans l'indifférence, l'insensibilité, s'établir à des milliers d'années-lumières de lui derrière un no man's land infranchissable (ce qui correspond alors à une position schizoïde).

Didier Anzieu, Une peau pour les pensées. Entretiens avec Gilbert Tarrab

mardi 18 avril 2023

Les mécanismes de défense servent le dessein d'écarter les dangers. Il est incontestable qu'il y réussissent ; il est douteux que le moi puisse pendant son développement renoncer entièrement à eux, mais il est également certain qu'ils peuvent eux-mêmes devenir des dangers.

Sigmund Freud, L'analyse finie et l'analyse infinie

lundi 17 avril 2023

Une bonté prête à l'envol sur chaque chose veille.

Rainer Maria Rilke, Le Livre d'heures

vendredi 14 avril 2023

La psychanalyse est une discipline qui dirige son attention sur des questions relatives à la qualité des premières relations, aux raisons de l'angoisse, à l'expressivité des symptômes, à la mémoire.

Claudio Neri, Le groupe

jeudi 13 avril 2023

Rigoureusement parlant - et pourquoi n'en parlerait-on pas aussi rigoureusement que possible ? - ne mérite d'être reconnu psychanalyse correcte que l'effort analytique qui a réussi à lever l'amnésie qui dissimule à l'adulte la connaissance des débuts de sa vie infantile (c'est-à-dire de la période qui va de la seconde à la sixième année).

Sigmund Freud, « Un enfant est battu ». Contributions à la connaissance de la genèse des perversions sexuelles

mercredi 12 avril 2023

Effectivement, c'est dans les rapports d'idéalisation qu'on voit les côtés mortifères, c'est-à-dire que jamais on n'est à la hauteur de son idéal. Et l'idéal vous dévore, donc vous fait sentir votre petitesse par rapport à ses exigences.

André Green, Associations (presque) libres d'un psychanalyste. Entretiens avec Maurice Corcos

mardi 11 avril 2023

J'ai appelé alliance inconsciente une formation psychique intersubjective construite par les sujets d'un lien pour renforcer en chacun d'entre eux et établir là la base de leur lien les investissements narcissiques et objectaux dont ils ont besoin, les processus, les fonctions et les structures psychiques qui leur sont nécessaires et qui sont issus du refoulement, ou du déni, du rejet et du désaveu. L'alliance est formée de telle sorte que le lien prend pour chacun de ses sujets une valeur décisive. L'ensemble ainsi lié (le groupe, la famille, le couple) tient sa réalité psychique des alliances, des contrats et des pactes que ses sujets concluent et que leur place dans l'ensemble les oblige à maintenir.

René Kaës, Un singulier pluriel. La psychanalyse à l'épreuve du groupe

vendredi 7 avril 2023

Nous ne sommes hommes, et ne nous tenons les uns aux autres que par la parole.

Michel de Montaigne, Les Essais, livre premier, chapitre IX (« Des menteurs »)

jeudi 6 avril 2023

Avez-vous déjà suivi un gourou ou un mentor ? Je l'ai fait. J'ai donné mon pouvoir à mes amantes, mes épouses. J'attendais, près du téléphone, j'attendais des permissions. Dans le travail aussi, j'ai attendu en tremblant le jugement des autres. J'ai donné mon pouvoir parfois subtilement, d'un seul regard, d'autres fois ouvertement, sans honte, à la vue de tous. L'exil, le bannissement, l'échec, peuvent être de bonnes choses car ils nous forcent à agir depuis notre centre et non plus à partir de quelqu'un d'autre. J'applaudis quand vous tombez au fond du trou, parce qu'au fond du trou, il n'y a que vous-même.

(Traduction de Christel Petitcollin)

Steven Pressfield, Turning Pro

mercredi 5 avril 2023

René Kaës a vu le premier que les deux modes spécifiques, dans une situation de groupe, d'élaboration secondaire d'un matériel fantasmatique latent sont le mythe et l'idéologie. Nous-même, nous avons remarqué que dans un groupe l'émergence du processus de symbolisation se reconnaît à ce que le discours collectif commence à contenir des figurations symboliques de la situation hic et nunc (cf. les thèmes de l'auberge espagnole, de Huis clos, de la Cène, du tribunal révolutionnaire, etc.). Nous avons également constaté que l'interprétation ne devient recevable par les participants que si leurs échanges verbaux ont accédé à cette symbolisation.

Didier Anzieu, Le Groupe et l'Inconscient

mardi 4 avril 2023

Il est essentiel de le comprendre : l'homme moderne est en fait un curieux mélange de caratère acquis au long d'une évolution mentale millénaire. Et c'est de cet être mêlé, de cet homme et de ses symboles, qu'il nous faut nous occuper, et dont il faut examiner la vie mentale avec la plus grand attention. Le scepticisme et la conviction scientifique coexistent chez lui avec des préjugés démodés, des manières de penser et de sentir dépassées, des contresens obstinés, une ignorance aveugle.

Carl Gustav Jung, Essai d'exploration de l'inconscient

lundi 3 avril 2023

Répétez quelquefois à voix haute : « Graine/germe/pousse/plant/plante ! »

Thomas d'Ansembourg, Cessez d'être gentil, soyez vrai !