lundi 25 novembre 2019

Dans son extraordinaire essai On Not Being Able To Paint paru en 1957, Marion Milner, analysant les obstacles psychiques qui entravent sa propre créativité artistique, parvient à une conclusion qui me touche chaque fois que je la relis. D'après la psychanalyste britannique, un excès de logique formelle dans l'appréhension de l'environnement social, qu'il intervienne momentanément ou tout au long de la vie d'une personne, s'oppose à à l'évolution et à l'adaptation que permet, à l'inverse, une pensée "réflective" (reflective thinking). Comprendre : une pensée qui autorise la rêverie telle qu'elle se manifeste notamment au travers de l'activité artistique. Grâce à cette forme de pensée flottante, qui permet de s'extraire de la distinction entre ce qui est moi et ce qui ne l'est pas (the "me" and the "not-me"), ce qui m'est propre ou ne l'est pas, pourra être trouvé un passage vers une nouvelle représentation symbolique du vécu.

Céline Curiol, Un quinze août à Paris, histoire d'une dépression