Je crois que le mot intégration décrit la tendance au développement et son accomplissement chez l'individu sain, accomplissement par lequel il ou elle devient une personne complète, unifiée [an integer]. Ainsi l'intégration acquiert-elle une dimension temporelle. L'état antérieur à l'intégration, je l'appelle non-intégration. En psychopathologie, il y a une désintégration qui est une défense, une fragmentation de la personnalité produite et maintenue dans le but d'éviter la tendance destructrice qui est inhérente à la relation d'objet après la fusion (des éléments érotiques et destructeurs).
Il y a alors aussi une dissociation, qui est une sorte de clivage assez sophistiqué dans lequel la personnalité totale n'est pas scindée. Cela n'est pas tant la "contrepartie pathologique de la non-intégration" qu'une forme sophistiquée de la désintégration. La non-intégration me semble décrire un état primaire, ou encore un état qui est associé cliniquement à la régression à la dépendance. La dissociation (comme la désintégration et le clivage) semblent être des organisations défensives.
Donald W. Winnicott, Lettre à Masud Khan du 26 juin 1961 in Lettres vives