Avec ce masque riant que vous me connaissez, je cache à l’intérieur le chagrin, l’amertume, et une tristesse qui s’attache au cœur comme un vampire.
Gustave Courbet, Lettre à Alfred Bruyas
Il faut beaucoup de temps - disons, une ou deux décennies de pratique clinique à plein temps - avant d'acquérir, en tant qu'analystes, une maturité qui nous permette de parler avec chacun de nos patients d'une voix tout à fait propre, d'une manière qui ne s'adresse finalement qu'à ce patient précis, à ce moment précis de la conversation analytique avec lui. Il faut avoir profondément intégré la technique psychanalytique avant d'être en mesure de l'“oublier”, c'est-à-dire de la redécouvrir par soi-même.
Thomas H. Ogden, Redécouvrir la psychanalyse
Un jour, dit la légende, il y eut un immense incendie de forêt. Tous les animaux terrifiés, atterrés, observaient impuissants le désastre. Seul le petit colibri s’activait, allant chercher quelques gouttes avec son bec pour les jeter sur le feu. Après un moment, le tatou, agacé par cette agitation dérisoire, lui dit : "Colibri ! Tu n’es pas fou ? Ce n’est pas avec ces gouttes d’eau que tu vas éteindre le feu ! "
Et le colibri lui répondit : "Je le sais, mais je fais ma part."
Sagesse amérindienne
Je me souviens d'une cascade au fond des grottes. Quelqu'un que je connaissais, un ami nommé Robert Desnos, parlait. Il avait retrouvé à la faveur d'un sommeil étrange plusieurs secrets perdus de tous. Il parlait. Mais ce qui s'appelle parler. Il parlait comme on ne parle pas. La grande mer commune se trouvait du coup dans la chambre, qui était n'importe quelle chambre avec ses ustensiles étonnés.
Louis Aragon, Traité du style
On est capable d’avoir de l’empathie pour de la douleur physique mais c’est plus rare pour de la douleur psychique.
Fayçal Mouaffak, Covid-19 en France : "derrière la vague épidémique, la vague psychiatrique", Ouest-France, 4 novembre 2020
Je me suis demandé si une réflexion sur le dialogue ne doit pas comprendre le moment où le patient se met à parler à lui-même parce que les forces qui sont à l’œuvre en lui se reconfigurent et engendrent en lui un réalité nouvelle. Quel rapport entre le dialogue thérapeutique et ce monologue qui, le moment venu, prend le relais ? Quel rapport, d’autre part, entre ce monologue-là et le phénomène plus général de la pensée et de son expression langagière ?
Jean-François Billeter, Le dialogue thérapeutique