Les caractéristiques de l'expérience mystique ont été différenciées en sept types par Stace, en 1961. On peut y voir une description de l'expérience mystique universelle, une « expérience religieuse primordiale », dépassant et intégrant les clivages imposés par les religions « institutionnalisées ».
En voici la liste synthétique :
- Qualité noétique : le mystique ressent ce qu'il vit comme une illumination ou un accès à la connaissance authentique : ses visions et pensées sont vécues comme appartenant à une réalité objective et indépendante, basée sur une connaissance directe et intuitive ;
- Emotions profondément positives (la texture de l'univers est Amour) : des sentiments de grâce, de joie, de paix, de bonheur et d'harmonie ;
- Sentiment du caractère sacré de la vie et de toutes choses : tout ce qui est appréhendé revêt une nature divine ;
- L'Unité interne : tout est « Un » ; sentiment que derrière la multiplicité apparente du monde, il y a une unité qui est appréhendée lorsque la conscience se détache des formes sensorielles et des contenus conceptuels ; au bout du compte, le mystique sent que les frontières du soi se dissipent et il devient un avec une existence plus large que lui-même ; s'y associe le sentiment que toutes les choses et créatures sont reliées, et que toutes les choses sont vivantes ;
- Transcendance des limites du temps et de l'espace : passé, présent et futur coexistent simultanément sur un axe vertical ; le mystique ressent que les notions de temps et d'espace ne sont plus applicables ;
- Ineffabilité de l'expérience : il s'agit d'une difficulté à décrire par des mots l'expérience mystique, les concepts habituels semblant inadaptés ou insuffisants, pour des phénomènes se situant au-delà de toute description verbale ;
- La paradoxalité : les canons de la logique sont remis en cause ; pour atteindre les royaumes du Divin, on doit laisser derrière nous notre rationalité habituelle ;
Pahnke (1963) rajoute deux autres catégories à cette liste :
- Le caractère transitoire : la durée de l'état de conscience mystique est délimitée, et bien différenciée quand l'expérience est terminée ; c'est une différence importante entre la conscience mystique et la psychose ;
- Des changements positifs durables dans les attitudes et les comportements : quand une personne traverse une expérience caractérisée par les huit catégories décrites ci-dessus, elle présente souvent des changements dans l'un ou moins des domaines suivants :
- envers elle-même : intégration plus forte de la personnalité ; plus grand sentiment de valeur personnelle ; détente des mécanismes de défense de l'ego ; meilleure acceptation de soi ; plus grande foi dans la créativité personnelle : plus grand optimisme ;
- envers les autres : plus grande sensibilité, tolérance, compassion et plus d'amour ;
- envers la vie : changements de valeurs, de buts et de signification de la vie ; plus grande implication professionnelle ; perte de la peur de la mort ; appréciation plus grande envers la totalité de la création ;
- envers l'expérience mystique elle-même : elle est ressentie comme ayant conduit à un apprentissage utile. Après être ressorti de cette expérience, bien des gens reconnaissent pour la première fois qu'ils sont le centre créatif de leur existence physique, qu'ils sont entièrement responsables de ce qu'ils font, autant par leurs pensées que par leurs actes ; leurs problèmes sont vécus comme le lieu par excellence où ils peuvent découvrir la sagesse et l'amour.
En effet, il existe, en dehors d'une expérience passagère, le transpersonnel au quotidien, qui se fait dans l'affrontement existentiel de la dure réalité de tous les jours et dans l'appel confiant au forces supérieures protectrices (Descamps, 1999).
Olivier Chambon et Michel Marie-Cardine, Les bases de la psychothérapie