Ceux qui ont du mal à s'endormir (trouble banal, bien qu'irritant que nous connaissons tous), prennent d'habitude des mesures essentiellement semblables et aussi stériles, pour résoudre leur difficulté. L'erreur la plus répandue chez les insomniaques consiste à se forcer à dormir par un acte de volonté — pour découvrir en fin de compte qu'ils restent complètement éveillés. De par sa nature, le sommeil est un phénomène qui survient spontanément, mais ne peut plus être spontané quand il est voulu. Pourtant, c'est ce que fait l'insomniaque dont le désespoir s'accroît avec le tic tac du réveil, et le « traitement » qu'il s'inflige en arrive à devenir sa maladie. Pour lui, « plus de la même chose » peut signifier changer de régime alimentaire, se coucher plus tôt ou plus tard, prendre des somnifères qui créeront une accoutumance : chacune de ces mesures, loin de résoudre son problème, l'exaspère.
Paul Watzlawick, John Weakland et Richard Fisch, Changements : paradoxes et psychothérapie