Freud ne renonce jamais au terme de guérison, jamais. Et ce, pour une raison extrêmement simple, c'est que l'on peut avancer, se fourvoyer, la guérison - pas la suppression du symptôme - mais la guérison... l'horizon de la guérison est ce qui seul permet d'apprécier la rencontre avec un fragment de vérité de la réalité psychique du patient. C'est quelque chose à quoi Freud ne cesse de se référer. Les analystes ne sont pas du tout intéressés à parler de guérison en tant que guérison du symptôme, parce que la productivité de la cure réside aussi dans la productivité de nouveaux symptômes. Cela suppose que l'analyste ne cherche pas à apaiser ou à faire disparaître le symptôme, à calmer le trouble puisque celui-ci est le territoire même de l'analyse. Les symptômes, anciens ou nouveaux, s'avancent eux aussi, fragment par fragment, sur le devant de la scène psychique - ce sont les termes de Freud à propos de la maladie s'avançant, morceau par morceau, dans le champ de la cure - et c'est fragment par fragment qu'ils vont être déliés.
Laurence Kahn, Fiction et vérité freudiennes, entretiens avec Michel Enaudeau